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Publié le 05 novembre 2024
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Des soldats du 95e régiment d’infanterie dans le secteur de Verdun, en 1916. © DR


À l’hôtel de ville de Bourges, une exposition va faire revivre le 95e-de-Ligne, un très glorieux régiment d’infanterie.
À partir d’aujourd’hui, et jusqu’au 26 novembre, la longue et glorieuse histoire du 95e régiment d’infanterie,
qui recrutait essentiellement Berrichons et Berruyers, vous sera contée dans une exposition salutaire.


La Ville de Bourges, et c’est la moindre des choses, a baptisé l’une de ses rues en mémoire du 95e régiment d’infanterie (RI),
ce 95e de ligne où étaient versés presque systématiquement, des années 1870 à la fin de la Grande Guerre, ses enfants et,
plus largement, les soldats issus du Berry.
« Le recrutement était essentiellement local, confirme Jean-Paul Volclair, président de l’Amicale des anciens et sympathisants des 95e et 85e RI,
deux régiments frères. Le 95e RI incorporait les soldats berruyers, les Berrichons. Ce fut vraiment LE régiment de Bourges.
Durant la Première Guerre mondiale, toutes les familles de Bourges, de la plus modeste à la plus illustre, ont compté un blessé,
souvent un tué ou un disparu, au sein du 95e RI. D’où le lien très fort, très puissant qui unit la cité à son régiment. »
Voilà ce que montrera, à compter d’aujourd’hui, et jusqu’au 26 novembre, une exposition, gratuite, accueillie en mairie de Bourges.
Elle sera inaugurée en présence du maire de Bourges Yann Galut, du conseiller municipal Pierre Dedet,
délégué à la Mémoire du patrimoine et aux anciens combattants, et du général Guillaume Santoni,
délégué militaire départemental et commandant des Écoles militaires de Bourges (les EMB).

À Austerlitz, puis au siège de Sébastopol


Formé en 1734, il devient officiellement, en 1791, le 95e régiment d’infanterie de ligne. Il combat, notamment,
dans l’armée napoléonienne à la bataille d’Austerlitz (1805), contribue en 1832 à la prise de la citadelle flamande d’Anvers,
puis au siège de Sébastopol (1854-55) lors de l’expédition d’Orient. Il est de la bataille de Puebla, au Mexique, en 1863.
C’est donc un régiment déjà couvert de gloire qui est installé, en octobre 1873, au camp militaire d’Avord, puis peu à peu à Bourges au quartier Carnot,
dans les casernes Condé, Vieil-Castel, Lariboisière…

À la Grande guerre, 2.600 tués ou disparus


« Le 6 août 1914, raconte Jean-Paul Volclair, le 95e RI quitte Bourges pour le front.
Il compte 3.000 hommes épaulés d’une compagnie de mitrailleurs de 300 éléments.
Sur cet effectif, 2.600 hommes seront déclarés tués ou portés disparus au combat. Une effroyable hécatombe. »
Versés dans un régiment de ligne, ses soldats sont par conséquent les premiers à sortir des tranchées et à se porter en première ligne
face à l’ennemi et au feu meurtrier des mitrailleuses. « Ils faisaient vraiment ainsi le sacrifice de leur vie », résume Jean-Paul Volclair.
Le 95e RI s’est illustré en février 1916 à Douaumont (Meuse), cité une première fois à l’ordre de l’armée pour avoir stoppé une offensive allemande.
D’avril à juin, il perd 238 des siens, tués dans la boue des boyaux des Éparges.
En 1917, le régiment combat aux Monts, sur le front de Champagne, puis en 1918 dans l’Aisne, à La Serre.
Seconde citation à l’ordre de l’armée, « pour avoir bouté l’élite des forces du Kaiser qui tentait une percée de la ligne de front ».
Revenu à Bourges en août 1919, il est en Moselle à l’automne 1939, puis affronte, en mai 1940, la 7e division blindée du maréchal Rommel
à Catillon-sur-Sambre (Nord). Anéanti, le 95e RI est « dissout de fait ».

Debout les morts !

Il n’est recréé qu’en 1963, à Bourges. En 1998, c’est la fin de la conscription, du service militaire.
Réorganisée en profondeur, l’armée française perd plus de cent régiments, dont le 95e de ligne.
Son drapeau est remisé à Vincennes. Sur l’insistance des autorités militaires de la ville, l’illustre drapeau est revenu à Bourges en septembre 2019.
Il est confié à la garde des EMB, « mais tellement abîmé, tellement usé qu’il y reste sous vitrine ».
Depuis, l’Amicale que préside Jean-Paul Volclair perpétue la mémoire et le souvenir du 95e de ligne, dont la devise reste, à jamais : Debout les morts !


Emmanuel Letreulle

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